Lisbeth & Megara

Juin 2014,

Le club de Rose Hip, le Mystic Club, était définitivement le meilleur endroit de la ville si vous demandiez l’avis de Lisbeth. Rangez vos sourires de pervers, elle n’était ni danseuse là-bas ni escorte, et elle n’y allait pas pour profiter de ces services-là. Non, si la néerlandaise pensait autant de bien de cet endroit alors que d’ordinaire ce n’était pas vraiment son genre – une héritière travaillant pour le compte de Chanel dans un club de striptease, quel beau décalage – c’était tout simplement parce qu’elle avait tout à porter de main. Depuis qu’elle avait décidé de commencer un business dans la Rosehaie, Lisbeth était aux aguets et avait besoin de repérer un maximum les lieux pour mieux étendre son trafic. Or elle n’était pas folle, elle minimisait ses apparitions en préférant largement se servir de ses contacts. Et de cette façon le Mystic Club lui permettait de ne pas rester totalement en dehors, c’était l’endroit parfait pour se camoufler tout en repérant ses prochaines victimes. M’enfin, sans rentrer dans les détails sombres de l’esprit compliqué de Lisbeth, disons simplement qu’elle appréciait se retrouver là-bas le soir, après une longue journée de travail. Et puis il fallait dire qu’elle était aussi toujours bien accueillie. La propriétaire de l’établissement et elle avaient trouvé un arrangement plutôt facilement, on pouvait même dire qu’elles étaient amies désormais. C’était simple, Jazz lui filait sa meilleure table et ne la questionnait pas sur les raisons de sa venue et Lisbeth la fournissait directement de chez Chanel. Simple et efficace, et arrangement qui n’aurait jamais pu fonctionner avec un homme. Résultat, Lisbeth avait la bonne impression de détenir toutes les cartes en main pour mener à bien sa petite enquête dans la Rosehaie sans se faire avoir. N’empêche que c’était un pari risqué. Vendre de la drogue, se mêler à des gens aussi miséreux pour ensuite tirer profit de leur pauvreté, c’était sacrément dangereux. Et tout ça pour quoi ? Pour venir satisfaire sa curiosité de journaliste et arrêter de se complaire dans une facilité barbante en menant une carrière chez Chanel. D’accord, c’était peut-être exagéré, il y avait largement pire que de bosser pour maison de haute couture aussi réputée, mais Lisbeth était une fille d’action qui avait besoin de se challenger constamment. Elle refusait absolument de tomber dans la routine, et la Rosehaie était pour elle une opportunité en or qu’elle ne pouvait retrouver nulle part ailleurs. Lennon ne le comprenait pas, au plus grand désespoir de Lisbeth. Mais Lennon avait beau avoir toutes les qualités au monde, c’était une juriste avec un esprit terre-à-terre et qui ne pouvait accepter pas accepter de sortir légèrement des limites fixées par la loi. Et ça Lisbeth pouvait le comprendre, ce qu’elle n’acceptait pas c’était de se faire juger par sa jumelle qui la tannait pour arrêter. Or, lorsque l’on connaissait Lisbeth, il était évident que lui imposer une conduite était le meilleur moyen pour se retrouver avec l’effet inverse que celui escompté.

Pour preuve, elle s’était rendue au Mystic Club une nouvelle fois pour faire un peu de repérage. Après avoir bavardé quelques minutes avec Jazz, elle avait passé sa soirée assise à sa même table un verre à la main, regardant les clients et les danseuses passer pour mieux venir leur arracher quelques paroles possiblement fructueuses pour son propre business. Sauf que cette soirée-là n’avait pour l’instant nullement été productive, à son plus grand désespoir. Dieu ce qu’elle détestait les échecs et les pertes de temps de la sorte ! Ce n’était pas comme si elle n’y avait pas mis du sien, elle était restée là pratiquement toute la soirée… "Debout les gars, je vais devoir vous foutre à la porte, il faut que je fasse du rangement ! ". Depuis l’autre bout de la salle, Lisbeth entend la serveuse s’adresser aux quelques clients du comptoir complètement alcoolisés qui étaient en train de lorgner sur elle. La pauvre, ça ne devait être évident de se taper tous ces lourdingues de fin de soirée… Sans réfléchir, la néerlandaise s’était rapprochée du bar, pour tenter une ultime action de la soirée. « Vous n’avez aucune chance les gars, arrêtez de la regarder comme ça. Il faudra franchement être désespérée pour avoir envie d’avoir une quelconque aventure avec l’un de vous. Les haleines alcoolisées et les ventres bedonnants, ce n’est pas vraiment le culte de la beauté masculine. », balança-t-elle à leur encontre sans se poser de question. Il fallait croire qu’une soirée aussi peu fructueuse la rendait encore plus acerbe qu’à l’accoutumée...et encore, elle avait voulu rester gentille ! Les pauvres hommes lui balancèrent un regard noir en guise de réponse avant de sortir du club avec une moue boudeuse bien loin d’être virile. « Désolée, les mauvaises soirées me rendent d’humeur assassine. », s’adressa-t-elle ensuite à la jolie serveuse. Depuis le temps qu’elle venait au Mystic, elle n’avait toujours pas eu l’occasion d’avoir une véritable conversation avec elle. C’était dommage, après tout elle était parfaitement dans les goûts de Lisbeth… Et puis c’était la meilleure amie de Jazz alors ça ne pouvait qu’être une fille bien. « Lisbeth. », se présenta-t-elle ensuite avec un sourire mystérieux. « T’as besoin d’aide pour ranger tout ça ? C’était une soirée chargée à ce que je vois. » C’était bien de le faire remarquer, il y en avait absolument partout. Et à ce rythme-là la pauvre allait rentrer chez elle à pas d’heure. C’était bien normal de proposer son aide, non ?
 

Lisbeth & Megara

Juin 2014,

La soirée avait été longue, affreusement longue, à la limite de l’interminable. Vous savez, ce genre de soirées qui avait tout pour être un véritable succès mais qui se finissait toujours en véritable désastre sans savoir à partir de quand le vent était venu souffler à contresens ? Eh bien c’était tout simplement ce qu’avait vécu la jeune van Houten jusque-là. Et comme chaque membre de la famille van Houten, Lisbeth détestait perdre son temps ou se retrouver à la place d’un quelconque roturier sans le moindre pouvoir. Oui, vous constaterez vous-même que la jeune femme avait un certain problème avec le pouvoir et plus spécifiquement avec la perte de pouvoir et d’influence qu’elle exerçait d’ordinaire avec élégance sur ses pairs. C’était comme ça, Lisbeth van Houten était une femme de pouvoir, d’action, et surtout qui ne lâchait jamais l’affaire. En d’autres termes, aussi peu productive sa soirée avait-elle été, la brune était bien loin d’avoir dit son dernier mot. Quitte à s’être déplacée pour rien, autant trouver un peu de réconfort d’une quelconque manière que ce soit, n’est-ce pas ? Ce fut certainement guidée par cette logique qu’elle s’était rapprochée du bar du Mystic Club… Trouver du réconfort, exercer son pouvoir – ô qu’il pouvait avoir de l’importance à ses yeux – sans oublier de balancer ses précieuses joutes verbales sur de pauvres hommes totalement soûls et en quête d’épanouissement libidineux… C’était tout ce qu’elle avait trouvé de mieux pour ne pas se laisser mourir d’ennui ou pire, pour ne pas rentrer chez elle les mains dans les poches en prétendant d’avoir passé la soirée la plus épanouie de sa vie alors qu’elle avait juste envie de se mettre des claques pour ne pas avoir aperçu ne serait-ce qu’une seule opportunité pour se rapprocher de son objectif final. Tout ça pour dire que Lisbeth avait fait son apparition sur le comptoir du bar avec le plus de théâtralité naturel dont elle était capable. Le moins qu’on puisse dire, c’était qu’elle avait réussi à venir en aide à la jolie serveuse assailli de tout côté par les derniers clients de la soirée qui avaient légèrement abusé sur la bouteille et ce tout en classe et raffinerie s’il vous plait. En guise de réponse, la brune qui lui faisait face lui avait accordé un sourire approbateur qui montrait clairement qu’elle avait apprécié le geste. « Joli ! », lui avait alors dit la demoiselle une fois que les lourdeaux de la soirée aient franchi la porte de sortie. « Merci, merci. Ce n’était que des propos saisissants de vérité entre nous, ce genre de mecs ne méritent pas plus de sympathie de la part de la gente féminine. », lui répondit Lisbeth avec tout le naturel du monde avant de lui lancer un nouveau sourire. Sans savoir vraiment pourquoi Lisbeth sentait bien que cette fille allait lui plaire, elle dégageait une attitude positive et énergique que la néerlandaise ne pouvait que saluer. "M'en parle pas ! Mais l'avantage d'une mauvaise soirée c'est qu'elle peut facilement se transformée en bonne soirée ! Tu as égayé la mienne avec ce que tu viens de leur balancer ! ". C’était exactement la preuve de ce qui venait d’être avancé, cette fille avait une énergie positive qui manquait cruellement à Lisbeth et qui n’était pourtant pas pour lui déplaire. « J’aime bien cette façon de penser-là ! Et je suis à ton service quand tu veux pour éradiquer les nuisibles de ce merveilleux établissement », dit-elle avec un léger rire cristallin. Lisbeth en garde du corps, oui ça pouvait faire sourire lorsque l’on voyait à quel point elle pouvait être affreusement frêle en apparence quand bien même elle maitrisait parfaitement l’art de se battre pour avoir eu la chance de pratiquer les arts martiaux. « Et tu ne peux qu’égayer ma fin de soirée également. », conclut-elle avec un regard un peu plus pesant que les précédents – enfin vous savez le genre de regard lourd en sous-entendus mais qui reste largement courtois. "Meg ", se présenta-t-elle ensuite avant d’accepter la proposition de Lisbeth pour l’aider à ranger le bar. "Proposé si gentiment je ne peux pas refuser et en plus ça m'arrange bien je dois l'avouer ! Promis après ça je t'offre un super cocktail ! " Un nouveau sourire naquit au creux des lèvres de la néerlandaise qui était bien contente de la tournure de sa soirée ! « Je suis quelqu’un d’adorable avec les gens méritants ! », répondit-elle en plaisantant. Oui parce que sinon adorable n’était pas tellement le premier adjectif qui venait à l’esprit pour la décrire… Mais il fallait croire que cette Meg avait le pouvoir de faire retirer en elle ce qui avait de mieux pour l’instant, et ce en l’espace de cinq minutes, merveilleux. « Je ne peux pas refuser une si belle proposition ! Les cocktails que j’ai pris jusque-là ne m’ont jamais déçue. En fait je dois bien dire que c’est l’une des raisons pour laquelle j’adore cet endroit », reprit-elle de plus belle. Non ce n’était pas du tout de la flatterie ou une tentative de drague – même si ça s’en apparentait beaucoup – mais seulement la vérité, ces cocktails étaient une véritable tuerie. Puis sans attendre plus longtemps, la brune vint rejoindre Meg de l’autre côté du comptoir et commença à ramasser les quelques verres qui traînaient devant elle avant de prendre un torchon pour nettoyer une partie du comptoir. Faire le ménage n’avait jamais été aussi agréable dis donc. C’était plutôt sexy aussi, astiquer, essuyer, ranger, ça requérait pas mal d’énergie...